Premier réel essai pour HAPPENING, groupe français de Post-Hardcore originaire de Aix-Les-Bains. Après un EP cinq titres enregistré alors même qu'il n'avait jamais foulé les planches, ce power-trio revient avec « In The Middle Of The Seas », sorti l'année dernière sur Send The Wood Music. Distillant une musique post teintée de reflets hardcore, rock ou même punk et ne s'attardant que peu sur les étiquettes, les Aixois nous plongent littéralement dans leur univers à travers, tout d'abord, la couverture de l'album aux couleurs froides et humides d'une mer déchaînée. Serait-ce déjà un avant-goût du monde auquel on nous invite ?

On entre sans plus attendre dans ce monde qui nous accueille avec le titre « It's All About Suffering ». Le ton est donné ! Un vrai melting-pot (ou « melting-post » en l'occurrence) musical nous submerge dès les premières notes. On se retrouve donc face à de la puissance pure, sans artifices, et dégageant une sorte d'aura torturée de par les paroles que crache le chanteur et les sonorités que les guitares arrivent à décrocher...
Malgré le fait que ce ne soit que le début de l'album, on pressent que cette dernière particularité sera assez présente tout au long de l'écoute. C'est en effet le cas avec « Week After Week », continuant dans la direction de la précédente composition. En effet, rien de nouveau ici, mais encore une fois l'impact musical l'emporte haut la main devant l'originalité.
Enfin pour l'instant... Le titre éponyme chamboule tout! Dans un registre définitivement plus calme et moins torturé, « In The Middle Of The Seas » nous prend de cours. Les dissonances que les guitares allaient chercher laissent place à des phases beaucoup plus mélodiques. La rythmique ayant été mise de côté, les aiguës solistes peuvent totalement s'acclimater à la place qu'on leur donne et ça leur réussit totalement. Au vue de la couverture, j'aurai vu ce titre justement plus sombre. Chercherai-je trop de froideur dans cette mer déchaînée ?
« Galilée » prend le relais et reprend cette lourdeur qui nous avait quitté sans pour autant ressombrer aux tréfonds de l'horreur, quelle qu'elle soit. La compo s'aventure parfois dans un style Punk/Hardcore, même si ce n'est effectivement pas la plus représentative de cette influence. Disons que l'on commence à entrevoir quelque chose qui se développe à certains moments (des transitions, des breaks...). HAPPENING serait-il entrain de nous dévoiler un nouveau visage ?
Oui. Je dis oui. Et bien plus que ça encore. « Love It Strong, Love It Wrong » est LA musique Punk/Hardcore mélo de l'album. Celle qui vous fait manquer le club underground du coin où tous les groupes HxC à la SILENT PLANET passaient, la plupart du temps en semaine vu que les dates en tournée sont assez difficilement bookables, et que vous ratiez parce que travail oblige. Ma vie ? Peut-être. Là n'est pas la question. Plus sérieusement, le côté Hardcore du groupe a prit le dessus ici, et inversement, le post n'est devenu qu'une influence assez lointaine. C'est ainsi que je ressens ce morceau : brut de décoffrage mais pas trop, le post veille !
Alors, là, on se demande ce que HAPPENING nous fait. « Crisis » débute sur un riff... presque pachydermique. Un petit côté Stoner se dégage de ce titre, assez vite éclipsé par une rapidité grandissante ainsi que par des mélodies trouvant leur source dans les groupes à la sauce HEART IN HAND. La combinaison que nous donne le groupe ici est intéressante même si elle n'a pas été aussi creusée qu'elle aurait dû l'être à mon goût...
Fini les riffs à la lenteur caractéristique, voici un retour aux sources. « Lifetime War » rejoint les deux premiers titres écoutés au niveau de sa composition, c'est à dire un gros mélange d'influences plus ou moins identifiées. Le problème dans ces mélanges, c'est l'indigestion que l'on peut avoir à force d'en avaler. Et je sens que l'overdose n'est pas si lointaine. Trois titres me diriez-vous, ce n'est rien ? Eh bien, la musique d'HAPPENING est une musique dense et, comme je l'ai dit, lourde. Leurs compositions « melting-potisées » sont extrêmement remplies musicalement parlant et peu de choses en ressortent lors d'une écoute attentive. Il faut vraiment faire un effort pour aller dénicher les éléments et, comme vous avez pu le voir à l'écrit, je préfère décrire vaguement ce spectacle pour donner envie à vous, lecteurs, d'aller tester par vous-même. La neutralité est de cette façon plus ou moins respectée...
Passons maintenant à « Like A Noise » et retombons dans ce côté Hardcore Mélo que j'apprécie tant ! Plus sérieusement, le groupe nous prouve un peu plus à chaque titre que la polyvalence est de mise lors de l'écriture, car même si j'ai essayé de prendre uniquement l'influence principale de chaque compo, c'est assez réducteur de tout catégoriser ainsi. Pour illustrer mon propos, on attaque par ce qui ressemble à du HxC Mélo pour finir sur un Post Metal à tendances Stoner. C'est vaste !
« Ghost » est encore plus vaste. Tout d'abord, une introduction type Post Rock nous accueille, avec son lot de guitares réverbérées et ses notes presque angéliques. Le batteur entrechoque ses baguette et à la manière d'un magicien transforme tout. Vous savez, « un, deux, trois, quatre ». Pouf. Puissance. Les changements de rythmes, de tempi, et autres retournements musicaux sont courants ici. D'ailleurs, la fin est du même acabit que cette intro. Déroutant mais sympathique. Bizarre mais élégant.
Bon là, on part à la limite du chaotique. Enfin, encore une fois par moment... Bref, « All In The Same Cage » est encore une fois un mélange, un mix. Le morceau est un peu difficile à avaler maintenant que l'on arrive en fin d'album mais passe plutôt bien. On ne fait juste pas attention, encore une fois, à tout tant ça va vite. L'ensemble est bon, faut bien le reconnaître...
Pour le dernier titre, HAPPENING nous livre un titre nettement plus personnel. C'est ainsi que je vois « Memories », un morceau sans trop de changements et plus radio-friendly dirons-nous. A la limite du Post et du Core, le groupe nous livre quelque chose de puissant, non pas musicalement parlant mais émotionnellement parlant. Une musique plus sincère et plus facile à écouter et comprendre en somme. Une bonne façon de fermer la marche !
Et bien pas tout à fait en fait. Officiellement, c'est un onze titres. Mais les Aixois ont habilement planqué un petit quelque chose au fin fond de la onzième et dernière piste : ça s'appelle « Full Power », c'est puissant mais aérien. Mais chut, c'est une surprise. A vous de la dénicher.

Je dois reconnaître qu'au fur et à mesure de mon écoute et de mon écriture, j'appréhendais de plus en plus la suite. N'étant pas très performant pour citer et lister les styles, ce mélange d'influences qu'est « In The Middle Of The Seas » m'a donné du fil à retordre, moi qui repose plus sur la description auditive. A l'écoute, ce mix est digeste mais de peu. J'ai quelque fois eu l'impression que le groupe se perdait dans leurs compos et surtout dans celles « melting-potisées » (j'aime bien ce mot). Heureusement, HAPPENING sait habilement doser ses autres influences ce qui permet de s'extasier sur des titres comme « Ghost », « Crisis » et surtout « Love It Strong, Love It Wrong ».
La noyade a été évitée de justesse dans ces eaux menaçantes...