Dans le sillon du « mathcore » creusé par entre autre THE DILLINGER ESCAPE PLAN, beaucoup de groupes ont germé notamment en France dès la seconde partie des 90’s. Par exemple les Normands du Havre DRAFT qui en 1999 se forment et se lancent dans la vague de cette musique psychotique que l’on pourrait ranger dans un certain « fourre-tout » créatif appelé globalement post/core ou post/rock. Les Frenchies avaient bien démarré avec leur premier album « Slow-Motion Suicide » paru en 2006 un peu brut de décoffrage. Mais les aléas de la vie en ont décidé autrement pour la suite, alors après un changement de line-up surtout avec l’arrivée d’un nouveau chanteur, la formation semble renaitre avec la sortie de « Harmonic Distortion » en ce Printemps 2010.

Avant d’insérer la galette dans le « mange-disque » il convient de remarquer l’artwork de couverture, cette ébauche de visage à l’image de la musique qui nous attend. En effet tout démarre avec un son faussement brouillon, et bien vite on pense à BOTCH, REFUSED et CONVERGE.
Donc à première vue (écoute), rien de très original en fait, mais le quintette y va de son énergie et de sa passion pour ce post/émocore enragé et tordu. Alors, bonjours les envois binaires soutenus entre distorsions, dissonances et rage intérieure extériorisée. Le chant screamo au possible est bien mis en avant au détriment des guitares souvent en « back-ground ». Outre la batterie précise et évolutive, la basse se laisse remarquer plus souvent qu’à son tour, ce qui n’est pas fait pour nous déplaire.
Les idées se bousculent dans les compositions marquant une certaine volonté de se soustraire d’un carcan stylistique déjà pré établi par d’autres auparavant. Ici on essaye d’être brutal, hargneux tout en conservant ces petites mélodies grinçantes qui vous écorchent l’esprit de façon insidieuse. Les climats instaurés sont de toute façon dérangés et suicidaires (écoutez le titre 8 « … » et vous comprendrez mieux). Ici le côté punk est aussi revendiqué mais sous sa forme éclatée, décapante et acide contrairement au punk dit « à roulettes ».
Le groupe a su conserver dans cet album le fort côté « noisy » qui lui va si bien. Par contre ce qui me dérange un tant soi peu, et qui modère mon accroche à leur démarche, ce sont les vocaux un peu monocordes sur la longueur faisant par trop référence à l’émocore de facture classique maintenant pratiquement disparu de la scène hardcore. Mais ces considérations sont tout à fait personnelles et traduisent mon ressenti de façon objective.

A part cette petite ombre au tableau, je pense que « Harmonic Distortion » est un bon album mature qui montre l’évolution d’un groupe en devenir comme l’avait laissé supposer, il y a quatre ans maintenant, leur premier véritable album. DRAFT mérite donc largement que l’on s’intéresse à son cas, il faut l’encourager en écoutant sa musique pleine d’énergie et d’émotions tout simplement.