Afin d'apprécier à sa juste valeur le nouvel opus de NEIGE ET NOIRCEUR, intitulé "Hymnes de la Montagne Noire", il convient tout d'abord de s'attarder longuement sur l'artwork de couverture de l'album. Ensuite, vous serez prêts à partir en voyage dans les paysages hivernaux du Quebec, au milieu du froid et du brouillard caractérisant cette saison glaciale particulièrement longue en ce pays.
NEIGE ET NOIRCEUR, si vous ne connaissez pas encore, c'est le projet solo "black-metal" engendré par Spiritus. Un musicien qui nous invite depuis l'an 2002, au travers de plusieurs albums et EPs, à partager l'ambiance occulte générée par des images fortes et sombres, où se mêlent neige blanche immaculée et ombres furtives des esprits païens habitant les lieux hivernaux du Canada.

Pour continuer sa démarche inquiètante, Spiritus avec ce quatrième enregistrement de 47 minutes, nous propose 5 hymnes distincts aux noms ensorcelants et imagés, "La Grande faucheuse ouvre La Marche", "Neige Noire", "Là où Demeure la Sorcière des Neiges", "L'aube des Magiciens" et "Le Chemin de la Montagne Noire". Et, curieusement, une reprise des BERURIER NOIR, "Les Bûcherons", vient clore cette invitation glauque qui nous met mal à l'aise à certains moments.
Mais tout au long de l'écoute de ces cinq hymnes, vous aurez par endroits la "chair de poule". Spiritus réussit à éviter la grande faucheuse pour créer des climats somptueusement prenants, alliant folk, légendes, métal noir et bruitages remontant des racines des arbres, là où la neige devient noire pour s'enfoncer dans les entrailles de la terre. Mais il faut lâcher les riffs, lâcher les cris, lâcher les visions d'horreur pour approcher du lieu où demeure la sorcière des neiges, cette sorcière qui nous enveloppe dans un linceul démoniaque et nous liquéfie l'esprit.
Mais après être sortis de cette demeure maléfique, le ciel s'éclaire à nouveau dans cette pâleur hivernale, et c'est l'aube des magiciens qui nous fait cligner des yeux dans le vent glacial qui se lève soudain et dégage la brume nocturne. Et tout n'est que renaissance, triomphe instrumental et cris s'éloignant de l'obscurité, magie d'une nouvelle clarté entrevue. Ensuite, il faut prendre le chemin de la montagne noire accompagnés par le bruit des oiseaux de malheur, la route est longue pour gravir les pentes abruptes jusqu'au sommet. Ce sommet désiré après tant d'épreuves, tant d'obstacles maudits, tant de paysages désolés dans le gel mordant des cimes éternelles dominant ces forêts noires et blanches qui nous ont marqué à tout jamais.
L'arrivée se fait tonitruante de voix criardes, de guitares aux riffs écorchant dans une ambiance crue, sauvage et hypnotique qui nous glace le sang. Ce sang rouge devenu noir après tant d'épreuves, tant de voyages bizarres qui nous ont propulsé au sommet de notre "moi" intérieur.
Magnifique, puissante et géniale, cette nouvelle oeuvre de NEIGE ET NOIRCEUR saura vous prendre l'esprit, vous voler votre âme et vous damner pour l'éternité.
La piste 6, dont j'appréhendais l'écoute, "Les Bûcherons", reprise de BERURIER NOIR, est ici méconaissable, transformée, transcendée par la musique de Spiritus qui s'est "approprié" cette composition, s'intégrant dès lors parfaitement dans les "Hymnes de la Montagne Noire", qui l'aurait cru ?

Maintenant, la question est de savoir si votre esprit est assez ouvert pour savourer ce nouvel enregistrement du sieur Spiritus qui arrive à nous immerger dans un monde vraiment occulte et imagé, se cachant dans les paysages de son pays rempli de montagnes et de forêts, où l'hiver prend toute sa dimension.
Au travers de ce récit musical aux couleurs "black-metal", c'est en fait une ode au Quebec (encore) sauvage qui nous est proposée, et de manière fantastique.