L’ésotérisme est un terme qui renvoie indiscutablement à une forme d’hermétisme, d’inaccessibilité… Peu surprenant que le sextette anglais ait choisi tel patronyme pour œuvrer, tant leur style est à mille lieux des "conventions" ! Jamais "Doom" n’aura été aussi profond, aussi rampant et visqueux. ESOTERIC fait dans la marche funèbre métallique, dans l’oppression musicale, dans le glaviot scintillant… À la croisée de MY DYING BRIDE et d’ANATHEMA des débuts, le groupe distille une complainte qui entraîne l’auditeur dans un voyage effrayant et quasi-initiatique (en évitant le piège de la redite).

Les riffs se veulent écrasants et la voix désespérée, mais par delà cette mare croupissante, surnage des nappes de claviers et des envolées de guitares sublimes et salvatrices. Ce qui marque l’efficience du groupe c’est ce contraste, ce mélange, cette alchimie dans lesquels le beau semble surgir de l’immonde ! Son audace aussi (sur le titre "Aberration", ESOTERIC n'hésite pas à inclure une introduction aux relents de "Jazz expérimental"). Ce double album est long, très long ! Plus d’une heure quarante de « lamentations » où les esprits sont malmenés et où les paysages ne sont composés que dans un camaïeux de gris (c’est vrai ce n’est pas très joli, mais c’est vrai !). Autant vous dire, qu’il faut un moral plutôt solide pour parvenir à s’enquiller ces sept titres. Inutile de décortiquer les morceaux de l’œuvre, « Paragon Of Dissonance » est un monolithe. Il s’écoute en une fois ou il ne s’écoute pas.

À la fois sombre et brillant, la musique d’ESOTERIC renferme la quintessence de « la beauté dans le désespoir » ! Un album de doom funéraire qui est à la musique ce que « Le cri » de Munch est à la peinture. Angoissant, mais fascinant !