Je dois dire que dans le petit monde de la chronique, ce qui m'arrive est assez rare.

En effet, il est peu courant de chroniquer à la suite deux albums du même groupe. C'est ce que je fais pour le groupe AL NAMROOD, dont j'ai chroniqué l'opus à venir en 2012 ("Kitab Al Awthan") il y a deux jours. Aujourd'hui, je me penche sur son prédécesseur direct, et datant de 2010 : "Esgorat Taghoot".
Néanmoins ce point apporte un écran de comparaison, qui transforme presque l'exercice typique de la chronique, en un exercice proche de la littérature comparée.

AL NAMROOD, comme je l'ai précisé dans l'autre chronique, est un groupe qui provient d'Arabie Saoudite. Bien sûr, vous avez tous en tête, ce que ceci engendre : Risque considérable pour les membres, pressions gouvernementales et religieuses...

Si l'opus suivant, celui-ci, a été enregistré aux studios du groupe, en Arabie Saoudite, cet opus, plus ancien donc, a, lui, été enregistré à Bahrein.
Sachez également que les membres ne sont pas les mêmes. "Mephisto" reste guitariste et bassiste, mais "Ostron" est aux claviers (à moins qu'il ait juste changé de pseudo, vu qu'ils semblent très proches...), c'est "Daruis" qui est batteur. De plus "Wardus" est le chanteur de session.
Cet album est toujours disponible chez "Shaytan Records".

Comme pour les groupes les plus illustres du "black metal", il me semble que cet opus est moins accessible que son successeur. Plus "raw", plus agressif, moins d'ambiances orientales. Il n'y a pas de doutes, c'est bien du AL NAMROOD, mais on y voit un aspect plus brut de décoffrage que sur la production plus récente.

"Esgorat Taghoot" est un album qui nécessite plus de temps pour son intégration à notre esprit. Si "Kitab Al Awthan" m'a collé une bonne petite claque sur le moment (sûrement due également à la surprise...), je dois dire que j'ai été moins emballé par "Esgorat Taghoot". Les ambiances moins travaillées, et le vocaliste, moins efficace, m'ont moins marqués.

De même, les rythmiques, très travaillées sur le suivant, sont plus simplistes. Bien sûr on retrouve des moments épiques et fantastiques sur cet opus (le break de "Ma Kan Mn AlDahr Mundthera" est, par exemple, un petit bijou), mais ils sont plus éparses.

Il est impossible de mettre en doute le talent du groupe, on a vraiment un album de qualité, mais qui est juste moins prenant et subjuguant que son collègue. De même, si le groupe réussit à être prenant sur tout les instants de "Kitab", il est plus à l'aise sur les passages lents de ce "Esgorat Taghoot".
Peut-être aussi que cet opus est aussi un peu trop long. Onze titres, de six minutes en moyenne.

Le thème reste fidèle à Babylone et à la Mésopotamie, en mettant l'accent cette fois sur Nabuchodonosaur, tyran des plus célèbres de l'époque des civilisations anciennes. Une légende de la tyrannie, comme le dit si bien le livret !

En bref, on a ici un album qu'il est tout de même plaisant d'écouter, mais qui pousse moins à l'osmose que son successeur.
"Estorat Taghoot" est un bon album qui contient ses moments de bravoure, mais qui, sans trop baigner dans l'exercice de la littérature comparée, souffre justement de la comparaison avec son illustre successeur que vous pourrez bien sûr découvrir.