Une fois encore,la Suisse se révèle une patrie regorgeant de groupes à la fois bruyants, torturés et talentueux . On avait cependant plus trop entendu parler de Cortez depuis leur premier album dévastateur « Initial » . Revenu sur le devant de la scène après un split cd de qualité avec Plebeian Grandstand en 2012, les helvètes ruent dans les brancards avec leur deuxième album Phoebus .

Il faut noter pour le profane que Cortez est un groupe à part dans la masse des formations noise et post hardcore, évoluant en power trio au sens non conventionnel du terme . Oubliez la sacro-sainte trinité Guitare/chant, basse, batterie et remplacez la par une configuration plus atypique  Chant, Guitare/basse, batterie . Sans rentrer dans les détails technique, le guitariste de Cortez utilise un procédé lui permettant de jongler entre ampli basse et guitare ou de jouer sur les deux en même temps . L'originalité du combo ne se limite pas à ce postulat, car Cortez fait parti des groupes possédant une identité forte, une patte diront certains . Leur musique abrasive et chaotique sort des sentiers battus et nous inflige un apocalypse sonore loin des stéréotypes , en accord avec leur démarche .

Attention la première écoute risque fort d'être abrupte : chant éraillé à l'extrême, structures mélodiques et rythmiques complexes, écouter Cortez peut être un exercice éreintant qui requiert une certaine dose de concentration pour en apprécier les vertus et subtilités . Passée cette impression de violence débridée qui nous saute à la gorge dès « Temps mort », ceux qui s'accrochent trouveront une fraîcheur unique dans « Phoebus » digne des artistes qui s'échinent à repousser les frontières des territoires connus . Le niveau technique des musiciens est excellent sans tomber dans le démonstratif, conjuguant maîtrise et hargne instinctive (« Arrogants que nous sommes », « L'autre Estime » ). Qu'il est bon d'entendre un chant au timbre unique rehaussant ce maelström de brutalité . La production n'est pas en reste, collant parfaitement aux couleurs du groupe tout en étant bien plus intelligible que sur « Initial » .
Un sans faute donc, autant dans l'intention que l'exécution, et le parti pris artistique rugueux du groupe ne lui confère que plus de charme . « Phoebus » est une œuvre intransigeante, et cette absence de demi mesure ne convaincra pas tout le monde, mais ne laissera pas non plus indemne quiconque osera y jeter une oreille .


Un album peu évident d'accès mais au bout de plusieurs écoutes vous ne pourrez plus vous en passer . Inspiré, inspirant et brutal, Cortez taille sa route sans regarder derrière, sans concessions .