Un album de The Mission est toujours ponctuée d'appréhension, tant le style du groupe est versatile depuis le début des années 80. Néanmoins, The Mission c'est avant tout une voix (Wayne Hussey, ex-Dead or Alive et ex-Sisters of Mercy), un son unique, entre mélange de guitares 12 cordes « chorussées » et une ambiance rock gothique voire médiévale... Mais les années 80 sont loin et il est toujours difficile pour un groupe avec un style particulier de se renouveler, The Mission l'a déjà tenté jadis sans grand succès avec les disques « Masque », « Blue » et « Neverland »...

A l'instar des deux précédents opus, « Aura » et « God is a Bullet », ce nouveau bébé est bien ancré dans la modernité, peut-être un peu trop car il faut vraiment du cran pour rentrer à fond dans les premières chansons, tant elles sont différentes de ce que le groupe a fait jusqu'à présent... « Black Cat Bone » et son intro soporifique est peu convaincante et les deux qui suivent, « Everything but the squeal » et « Sometimes the brightest light comes » peinent à soulever notre intérêt, de par la lenteur du rythme et la longueur des couplets monotones et lancinants.

Il faut attendre « Born under a good sign » pour sentir l'énergie surgir de la musique, rappelant un peu le vieux Cure et « The Girl in a fur skin rug » et ce son de sitar électrique, si typique qu'on se croirait revenu dans leurs premiers albums (« God's own medicine », « Children »...). La ballade qui fait du bien dans un album rock est ici bénie après ce déluge d'accords stoïques et peu variés, « When the trap clicks shut behind », aérée, pure, vraiment bien sentie et on commence à reconnaître la voix de Wayne, certes éraillée par maintes années de tournées, de fatigue et d'excès en tout genre....

Plus l'on avance dans le disque et plus les chansons donnent le frisson, la timidité des premiers morceaux a fait place à l'émotion et aux ambiances médiévales et épiques... « Ain't no prayer... » est une perfection d'émotion, tant la voix grave de Wayne nous dresse les poils au fil des notes, cet accordéon mélancolique et ce petit Hammond, sonorité très rare chez The Mission, tend à prouver que l'inspiration ne les a jamais quitté... (trois des quatre membres d'origine font partie de l'album et ils ont l'air de se faire plaisir à nouveau...).

On passera très rapidement sur « Just another pawn in your game », l'intrus du CD, très folk à la Dylan, avec l'harmonica country et tout... et nous revenons au trois chef d' oeuvres qui terminent l'album, « From the Oyster comes the Pearl » avec ses accords mi-acoustiques médiévaux, « Swan song » où le chant se révèle une fois de plus transcendant et où les soli de guitares sont à pleurer de feeling – un morceau qui devrait cartonner en live ! - et enfin « Lithany for the faithful », morceau guitare acoustique/chant, où Wayne fait corps avec son instrument, nous ressort cette voix basse qui ferait mouiller la plus frigide des soeurs d'un couvent et nous couvre de majesté dans cette musicalité extraordinaire et presque magique.

Un album qui se laisse apprivoiser, qui se fait désirer dans la longueur, mais je vous le conseille vivement, ne serait-ce que pour les derniers morceaux, qui sont pour moi des chef d' oeuvres d'émotion... Je vous laisse, je vais replonger dans "Ain't no Prayer", verser quelques larmes d'enchantement...