Le Québec semble depuis un petit moment se créer une place de choix au sein de la scène metal internationale. Et pour preuve le black metal québécois (ou plus correctement « Metal Noir ») est carrément devenu une valeur sûre dans le milieu black metal. Le label local Sepulchral Productions prend de plus en plus d’ampleur et en devient une référence incontournable, au point de commencer à attirer des groupes non canadiens (comme les blackeux suisses de Borgne). Le Metal Noir québécois est emmené par des figures de proues telles que Forteresse, Monarque, Sombres Forêts ou encore Gris, chantant tous sans exception dans la langue de Molière.

Neige et Noirceur est un de ces rejetons issus des contrées de la « Belle Province », moins connu et reconnu que ces compatriotes précités, mais tout aussi talentueux, impliqué et prolifique au sein de la scène. Formé en 2002, le one-man band emmené par son géniteur et multi-instrumentiste Zifond Spiritus Malabus a déjà à son actif quatre albums. Neige et Noirceur pratique un black metal ambiant teinté d’influences Drone. Tout au long de sa discographie, le projet aborde des sujets liés à l’histoire et les légendes occultes de la province francophone.

Les hostilités démarrent avec le morceau éponyme. Nous avons ici affaire à un black atmosphérique sur fonds de guitares grésillantes et tourmentées et de lamentations écorchées. A la fois très froid et inquiétant, le clavier joue sur des sonorités très planantes et apporte de la profondeur à l’ambiance mortuaire du titre. « Future Torture » nous embarque dans une chevauchée de riffs épiques, mêlés aux claviers aériens, et le chant se fait, cette fois-ci plus rauque.
Le rythme global de l’album est plutôt mid-tempo, avec Neige et Noirceur, l’auditeur n’est vraiment pas dans la primitivité immédiate du black, les passages plus typés Drone et Ambiant sont là pour le rappeler : Spiritus cherche d’abord à privilégier une atmosphère inquiétante et hors du temps. Les riffs sont en parfaite osmose avec les claviers et forment des mélodies simples et répétitives, mais ils ne tombent jamais dans une redondance que l’on pourrait retrouver dans certains morceaux de DSBM, une véritable tension se créée et rajoute encore plus de profondeur à l’ambiance glaciale.
La voix de Spiritus utilise différents registres et possède un aspect quasi-inhumain. En effet, le vocaliste passe de la voix black criarde, à un chant plus rauque ou encore des lamentations ou des passages narrés (« Le Portail de Kadath », « Les Cavernes de Glaces III »).
Le disque se clôture sur le triptyque des « Cavernes de Glaces » et verse dans de l’ambiant pure, exit le black metal, place ici à une froideur spatiale mise en exergue par les claviers.

« Gouffre Onirique et Abîmes Cosmiques » est plus qu’un excellent album de black metal. C’est une œuvre d’art complète et aboutie. Les riffs torturées et épiques du black metal croise le drone/ambient le plus glacial qui soit, pour un mélange unique et prenant de bout en bout. Même si Neige et Noirceur ne bénéficie pas d’autant de visibilité que ces confrères de Sepulchral, cet album est incontestablement à ranger aux côtés des derniers très bons albums de Sombres Forêts et Gris sortis l’an dernier. Avec des disques de cette trempe, le Metal Noir affirme sa confortable place au sein de la scène black metal internationale. Gare à vous les scandinaves, les Québécois sont en train de vous faire de l’ombre !