La pochette de l'album est une bonne allégorie de son nom : pas de doute, le monstre est bien vivant. « The freak is alive » est le deuxième effort des norvégiens de Momentum, trio islandais formé en 2003 après « Fixation » en 2010 et deux autres EP (« The requiem » en 2006, « your side of the triangle » en 2008).
A l'image de l'artwork singulier imaginé par H.Olafsson (chanteur et bassiste) Momentum a su créer un univers qui lui est propre. Un monde froid, onirique, violent, éthéré, atmosphérique, oppressant, triste et mélancolique. Autant de qualificatifs pour tenter de décrire l'effort de synthèse que la formation scandinave s'est attelée à opérer. En effet, au gré de ces neuf titres longue durée, on navigue entre différentes orientations métalliques (qui cela dit au passage ne sont jamais très éloignées les unes des autres) allant du sludge au post hardcore en passant par du doom atmosphérique avec une pincée de gothique ci et là. Bien que des références à des formations comme Neurosis, Cult of Luna ou encore Isis peuvent se faire sentir de temps à autre (influences que le groupe d'ailleurs ne renie pas), les compositions sont pertinentes et évitent habilement les clichés.
La colonne vertébrale de l'opus est une musicalité à la fois dépressive et pesante, mélodique et extrêmement puissante. Si l'instrumentation, grave et dissonante de rigueur, remarquable par la noirceur harmonique et rythmique qu'elle donne à chacun des morceaux, il convient de souligner la force impressionnante apportée par la majestueuse voix sombre et gutturale de H.Olafsson. Quel que soit son registre, apaisante, menaçante ou apeurante, elle porte littéralement les morceaux en leur donnant leur âme. On remarquera également la qualité de la production en général, et celle des arrangements en particulier (je pense notamment aux cordes) qui donne la texture solide et profonde nécessaire à un opus de la trempe de « The freak is alive ».
De « Bury the eyes once gold » qui ouvre l'album à « Depth of the whole », neuvième titre qui le clôture, on retrouve invariablement les mêmes alternances de violence et de repos, de variations rythmiques down et mid tempo. Des phases de colère et de rage puis de calme et de sérénité. La même résignation, la même lucidité désespérée, ce même triste rêve qui parcourt l'ensemble des morceaux.
Certains passages lancinants, notamment sur « Gauntlet », « The freak is alive » ou « Undercover Imagination », sont quasiment hypnotiques, voir mystiques.
Seul « Familiar Unknown» sort de ce canevas. Ce morceau d'à peine plus de deux minutes (contre les 5 à 7 habituelles), ne nous offre que des sonorités éthérées procurant un court répit avant de se replonger dans le tourbillon musical monstrueux imposé par la formation islandaise.
Malgré quelques longueurs qui peuvent se ressentir de temps à autre, on ne pourra globalement que saluer la cohérence et la qualité de cet album, transportant l'auditeur dans une dimension parallèle. « The freak is alive » est un concept, les titres étant des prétextes à découper une matière sonore unique, émotionnellement perturbante... et addictive. A ne surtout pas manquer.