Troisième album de ce groupe français totalement à part, Eclats me pose un cas de conscience sévère. Le style est un savant mélange de metal progressif, d'atmosphérique et de black... Les textes chantés en français ajoutent à l'étrange de l'ensemble et au chaos que peut provoquer cette musique décharnée, empreinte de poésie morbide et de métaphysique obscure...


Je ne ferai pas de titre à titre, cet album est un ensemble compact de musique incomparable, ayant un son particulier, des ambiances très personnelles et une marque vocale unique, et là je m'interroge, d'où ce cas de conscience...

Il n'y a vraiment rien à dire sur la musique, qu'on aime ou pas.. le style des guitares très dissonant, voire dis-harmonique peut en rebuter plus d'un, c'est un fait.. Mais personne ne pourra reprocher à Orakle de bâcler son propos, les compos sont parfaitement interprétées, pas un creux, pas un faux pas, du vrai travail de pro, ils nous provoquent des émotions un peu contradictoires, de par leur musique autant que leurs textes...

Les vocaux donc, véritable sujet de mon problème, sont tour à tour chantés en « clair » et black genre Misanthrope, la grandiloquence ridicule en moins... C'est un style, un choix de mélanger textes français avec des mélodies proches de la variété la plus emblématique de notre cher pays et de la pop, même les vocaux saturés ne parviennent pas à nous convaincre de leur propos..

Je sais pertinemment que certains fans du groupe crieront au blasphème en lisant mes propos, s'ils les lisent bien sûr, mais ce n'est qu'une histoire de goût... Mon ressenti est tel, qu'il y a un trop grand fossé entre la musique où l'on ne peut rajouter ni ôter une seule note tant tout est parfait et le chant où tout est à étudier à nouveau... En d'autres termes plus clairs, j'adore cette musique que je trouve innovante et décalée, mais où il faudrait remplacer cette façon de chanter par un (voire deux?) chanteur(s) plus dramatique(s) dans l'intention, plus caractériel(s) en somme, et effacer l'effet « poète maudit solitaire en transe » en essayant l'anglais, l'effet serait à coup sûr moins réducteur et plus ouvert sur le monde...

Orakle fait partie d'un contre-courant bienvenu dans l'univers du metal français, peut-être l'identité nationale est un peu trop prononcée par cette poésie noire et sans véritable sens... Un mot sur l'illustration de l'objet : la noirceur et l'inquiétude de la musique sont très bien imagées par les œuvres de Robert Le Lagadec, sculptures découpées et écorchées de parties de corps humains, très frappantes et dérangeantes, comme la musique... Un beau disque d'art contemporain...