Derrière Prophecy Productions au goût certain, le label français des Acteurs de l’Ombre est, malgré sa - relative - jeunesse, probablement mon préféré. Cette belle histoire a commencé, pour moi, à la découverte de deux albums particulièrement mémorables, Al Azif de The Great Old Ones et Regarde les Hommes Tomber du groupe éponyme.
Depuis, je suis ce label émergeant avec intérêt, espérant à chaque nouvelle signature pouvoir ressentir un coup de cœur aussi intense que celui ressenti durant l’écoute du premier album de Regarde les Hommes Tomber. J’ai ainsi chroniqué de nombreux albums issus de « LADLO », notamment le second de ce même groupe mais également des albums de Maïeutiste, Darkenhöld, Moonreich, Déluge ou encore d’In Cauda Venenum et Profundae Libidines au sein de la branche Emanations du label. Cependant, si j’ai apprécié, à des degrés divers, chacun de ces albums, je n’ai pourtant toujours pas revécu ce moment tant espéré.

Optimiste au sujet de cette quête, c’est avec espoir que j’ai donc écouté les dernières signatures du label, parmi lesquelles figure un certain groupe au nom à rallonge : Wildernessking. Etonnée d’apprendre qu’il s’agit d’un groupe sud-africain, il me fallait découvrir ce groupe de toute urgence. C’est désormais chose faite. Or, avec l’album Mystical Future, Wildernessking me permet d’approcher, bien plus que les autres albums chroniqués, ce coup de cœur fermement attendu.

Il faut dire que Wildernessking, ce quatuor créé en 2011 et issu des environs du Cap, n’en est pas là à son premier essai : d’une part, il s’agit là d’un second album et, d’autre part, les membres du groupe ont pris leur temps pour créer cet opus dans la mesure où ce dernier a été composé en 2012 et 2013 et a seulement été enregistré en 2014.

Depuis la sortie de Sunbather de Deafheaven, j’ai remarqué cette tendance épuisante dans les news ou chroniques de webzines à sans cesse associer maints groupes de post-black metal à ce quintet américain (« pour les fans de Deafheaven », etc.) et force est de constater que je tique toujours à cette vue, trouvant les similarités bien trop lointaines ou trop épisodiques pour en faire le groupe le plus analogue. Je me méfie donc comme de la peste de cette étiquette car, si les genres du post-rock/metal/black metal comportent toujours énormément de similarités, les groupes sont pourtant tous uniques pour les oreilles d’un passionné.

Ecoutez donc New Bermuda, le nouvel opus de Deafheaven et noyez-vous dans ses nappes progressives… car ce groupe n’est pas n’importe quel groupe de post-black metal : son approche musicale est bien différente de la majorité des autres formations de ce genre. Tout comme Wildernessking, à ma grande surprise et pour mon plus savoureux plaisir.

Mystical Future commence ainsi par "White Horses", purement comparable à l’approche et à la sonorité du post-black metal que l’on peut entendre dans New Bermuda. Ce morceau allègrement ambiant mais pourtant si intense, coulant dans le progressif, noie l’auditeur dans des vagues désespérées de mélodies passionnées.

"I Will Go to Your Tomb" est un excellent exemple de ce don de Wildernessking de créer un véritable clair-obscur de post-black metal, essentiellement lumineux malgré son apparente brutalité : le morceau commence ainsi dans une pure violence, emportée par une batterie destructrice et des hurlements profonds, pour ensuite s’adoucir délicieusement et mêler douleur et espoir.

Le troisième morceau, "To Transcend", représente à merveille le sens de la poésie du groupe sud-africain. Il s’agit là d’un morceau aérien de post-rock qui dévoile doucement sa beauté teintée de mélancolie. Ce morceau, quasi-instrumental, est un véritable poème, une précieuse gemme qu’il faut écouter avec son cœur.

"With Arms Like Wands" est, quant à lui, un morceau un plus classique, plein d’énergie et clairement orienté black metal qui parvient tout de même à perdre l’auditeur dans les méandres de ses ambiances, les hurlements rappelant alors tantôt qu’il ne s’agit pas là d’un projet instrumental.

"If You Leave" vient alors doucement conclure cet album trop court, enchanté par la délicate voix d’Alexandra Morte. Là encore, ce morceau est composé de vagues mélodiques qui le transforment en une ode sensible, en une épopée progressive.

Mystical Future est ainsi un album d’une grande qualité pour un groupe trop méconnu. Et si le groupe n’invente rien dans le genre, il compose pourtant à merveille un post-black metal intelligent, atmosphérique et progressif. Seul le temps me permettra de déterminer s’il s’agit pour moi d’un chef d’œuvre musical mais une chose est certaine : les dernières minutes de cet opus sont frissonnantes et me feraient aisément couler une larme si elles étaient jouées devant moi tant elles sont intenses et belles...