L'artwork (sublime au demeurant) du dernier album des Allemands de FJOERGYN rappelle ceux des derniers ENSLAVED. Musicalement nous sommes un peu plus éloignés. Formé à la base comme un projet solo de STEPHAN L., avec pour ambition d'associer des éléments de la musique classique au métal, FJOERGYN est aujourd'hui un groupe à part entière dont la genèse même du projet n'a pas changé dans l'approche, mais elle a évolué. Mixer des genres musicaux différents oui, mais sans se limiter à deux genres particuliers dorénavant. Et l'on aboutit en 2017 à LUCIFER ES, 5ème album, dans la continuité de l'EP 2016 TERRA SATANICA. Un album dense, mais peu évident.

Comme pour la plupart des albums dit d"avant garde", les codes de la musique sont un peu bousculés. La durée des morceaux est longue (entre 7 à 11 minutes en moyenne), il est entièrement chanté en allemand, le son est très fouillé et éclectique. LUCIFER ES est un album qui, pour être apprécié, doit être écouté et l'on doit s'y plonger. C'est alors qu'on découvrira la densité de la musique qu'a à nous offrir l'album, du début MMXVII à la fin FREIHEIT.

Et FJOERGYN a de la ressource pour captiver son auditoire. Nous entendrons donc quelques éléments de la musique classique : des chœurs d'opéra sur LEVIATHAN ou LUCIFER ES, plusieurs passages baroques sur BLUT SAMEN ERDE, tout en piano et cordes, qui adoucissent la musique des Allemands. Une guitare chaude et hispanique introduit LUCIFER ES, morceau qui se termine de façon plus brute, comme un morceau de métal extrême en somme. On note une volonté atmosphérique, presque rock progressif dans l'approche de certaines lignes de guitare, à l'instar de DINNER MIT BAAL, aux accents jazzy. Ce morceau, au final génialement rock, est d'ailleurs très dense, mêlant plusieurs styles musicaux. Ce qui nous fait dire que, définitivement, l'album mérite le qualificatif d'avant-gardisme, plus que de progressif.

Evidemment, les 2 pièces maîtresses de l'album, 23 minutes à elles seules, que sont DINNER MIT BAAL et FREIHEIT renferment l'essence même de l'album. FREIHEIT termine l'album sur une maestria guitaristique, un solo technique fabuleux, précédé d'un passage atmosphérique oppressant, sentiment que l'on ressent à plusieurs moments de l'album. Et un mélange d'autant d'émotions ne peut tromper sur la qualité d'une musique.

LUCIFER ES est un très bon album, avec une production aux petits oignons pour nous permettre d'apprécier les détails et différents styles que nous propose FJOERGYN. Il serait dommage, pour tout amateur d'ENSLAVED, SOLEFALD ou ULVER de passer à côté de LUCIFER ES. Vraiment, vous ne serez point déçu, Lucifer sait être agréable.