Il existe de par ce monde des réfractaires au modernisme artistique et c’est d’ailleurs bien légitime vu l’utilisation, par certain et à mauvais escient, des nouvelles techniques d’organisation du son et de l’image. En ce qui concerne la musique, cela se matérialise principalement par un retour aux sources, à cette période cruciale dans l’histoire des musiques saturés et amplifiés, en somme, là où tout à commencer. Bel exemple de cette envie d’inverser la course du temps qu’est le premier effort de Chrome Division. Evidemment, le bien nommé Shagrath, guitariste pour cette aventure, peut profiter de sa popularité au sein de Dimmu Borgir pour amener les feux de la rampe à se tourner vers son projet parallèle et c’est dans l’ordre des choses.

L’expression des Norvégiens se concentre dans cette force brute à composer des morceaux simples et directs. Difficile à l’écoute de ce "Doomsday rock ’n roll" de ne pas penser immédiatement à Mötorhead tant cette rythmique endiablée et proche de l’énergie punk rappelle brutalement les sonorités de Lemmy et sa bande. La production est atypique de celle du début des années 80, grasse et restituant parfaitement ce souhait d’appartenance à l’ancienne école, elle se révèle être tout à fait circonstanciel et synonyme de réussite certaine. Basse omniprésente profitant d’un mix à son avantage, guitares aux langages simples mais efficaces et un chant s’intégrant harmonieusement à la dynamique de l’ensemble. En ce qui concerne la qualité de chacun des titres, cela oscille entre le bon et le très bon avec en tête les excellents "Serial killer" et "We want more" sublimés de chœurs féminins.
Par ailleurs, mention très bien aux soli qui parsèment l’effort, véloce, mélodique et typé hard rock, ils enrichissent, de façon notoire, la teneur des compositions. L’intensité de l’ensemble ne faiblit à aucun moment et tout en restant cohérent, les musiciens donnent l’impression de s’amuser comme de jeunes premiers. Vapeurs de bière, débauche et légèreté, voilà les motivations de Chrome Division. Mais pourquoi s’alourdir de subtilités et alambiqué les propos lorsque initialement, le disque est prédestiné au divertissement ? En tout état de cause le but est atteint et l’on prend part sans peine à ces réjouissances.

Même si tout cela s’apparente à une pause récréative, force est de reconnaître que le résultat est fort plaisant et que les Norvégiens évoluent dans univers musical qu’ils maîtrisent parfaitement. Rock n roll attitude disait Johnny, notre héros national à tous (sic), voilà tout simplement un tout autre exemple d’un genre musical constitutif caractérisé par la délicieuse binarité. Un premier essai rafraîchissant, brut et s’appréciant sans que les protagonistes du projet fassent de la surenchère en s’aidant d’exhausteurs de goûts.