CHRONIQUES ALBUMS

Avant le chaos, avant le néant, le firmament, la douleur, la torpeur. MALEPESTE est une formation lyonnaise de black metal gravitant entre mélodies dissonantes et vocaux d’outre-tombe. Dix ans sont passés depuis le dernier album, mais les Lyonnais ont su combler le manque avec de nombreux splits et projets de chacun des musiciens, très impliqués dans la scène lyonnaise.

L’ambiance malsaine domine par des rythmiques entrecoupées de voix off divulguant la haine d’un esprit rebelle et belliqueux. Le récital est aussi sombre et déstabilisant qu’une plongée sous-marine vers des abysses toujours plus profonds. La voix de Larsen y est pour quelque chose, tant le désespoir et la révocation de la lumière nourrissent ce chant meurtri. Le growl est lourdement assaisonné de résonances, mais aussi criard et blafard, tel le hurlement d’un spectre revenant.
Le chant, tantôt en anglais, tantôt en français, maintient la flamme d’un texte sans ambages, saisissant l’opportunité de refrains parfois accrocheurs, pour sûr qu’on est bien sur du pur black metal.

Les échos, ces chœurs qui résonnent au gré de riffs sataniques au possible, démontrent que MALEPESTE maintient son intention de créer une ambiance ritualiste, ce qui est d’ailleurs accentué sur scène avec un décor d’ossements, de bougies et d’encens.
Ces “echoes, from the past… from below” (“Stupor”) lancent la mélodie et nous plongent dans une torpeur qui engourdit nos membres et nos esprits, en vue de mieux rentrer dans le rite.
Aux échos et aux abysses surplombent les cris du protagoniste, prédicateur d’un avenir ténébreux. Ses cris font révolte et amplifient la vision du néant qui approche, un ex nihilo intérieur donnant lieu à la réflexion.

La rythmique est en général assez lente, voire doomesque (“Imperium”). À de nombreuses reprises, le changement de rythme accentue la sensation d’effondrement. Les instruments semblent se désaccorder ou basculer sur un plancher instable, la basse maintient une ligne funeste sur laquelle s’échappent de lourds coups de fûts. Les guitares gardent le cap, mais guident l’auditeur vers un point toujours plus brumeux et tortueux. Le ressenti est grandiose.

Le final de l’album surprend par son caractère des plus symphoniques, les instruments électrifiés laissant place à un orchestre de cuivres et d’orgue menaçants. La marche funèbre enclenchée, c’est tout ce qui nous restera pour nous sustenter de ce troisième opus, car s’il y a bien une remarque à faire, c’est que ces 34 minutes sur 6 titres restent le minimum syndical. Léger sur la durée, donc, mais lourd sur le fond et l’intensité.

Le mix a été réalisé par le studio Akashik (Catubodua, …) sur Lyon, bien entendu. Quant au mastering, il a été confié à Ben, de chez B-Blast Records, structure bretonne ayant déjà collaboré avec Aorlhac, Les Bâtards du Roi et Black Bile notamment. Le travail de ces deux acteurs de la scène black (mais pas que) sublime le rendu final de cette dernière production et rend Ex Nihilo comme l’album le plus abouti de la discographie du groupe. Au son léché par les différences mesurées des musiciens et des techniciens précités, l’appui de la technique crée une œuvre achevée avec panache et d’un artisanat très apprécié.
Fort de cette reconnaissance, la bande de Lugdunum rejoint pour l’occasion les rangs des Acteurs de l’Ombre, ce qui devrait étancher leur soif promotionnelle et agrandir leur réseau, et c’est tout le mal qu’on puisse leur souhaiter.

Lineup :
Larsen : chant
Xahaal : guitare
Herjann : guitare
Nostra : basse
Flexor : batterie