Entre une dizaine de chroniques médiocres et trois nullités, parfois se cache le Saint Graal. Rarement il m’a été donné de découvrir un album pareil, de subir une onde de choc aussi forte qu’avec « Ceremony Of Opposites » de Samael ou « IIII » de Farsot.
Fermez les yeux. Le décor est posé. Vous naviguez dans une cité à l’architecture ancestrale, aux décors résolument modernes. De grands blocs de pierre à l’insolente grandiloquence. Côtoyés par des pans de zinc, ils s’imbriquent avec une élégance rare. L’étendard de la superbe flotte dans cette oasis qui vous lie de ses bras joints. Tout ici bas est froid. Les gouttes vous heurtent. Le temps n’est plus. Vous êtes tombés sous le charme glacé d’« Exit ». La pluie ruisselle de pair avec vos larmes le long de votre visage. Haletant, vous marchez à travers ces images qui se heurtent au fond de vos cerveaux. Votre regard se pose partout, tentant de trouver une échappatoire à cette divagation. Inutile de fouiller. C’est pieds et poings liés que vous subissez avec passion cette heure de voyage proposée par les allemands d’Agrypnie. Retour sur la planète.

Deuxième album de ce combo allemand encore méconnu, « Exit » est un monolithe aux dimensions aussi intimistes que globales. Malgré leurs durées disparates, les onze compositions se suivent sans un sourcillement. Leur enchainement se trouverait presque sur la ligne de mire de la perfection… A l’humeur si particulière, la musique d’Agrypnie est toute en apparats et toute en turbulences. Elle pourrait être dépeinte comme un black métal moderne voire avant-gardiste, peu avare en émotions.
Si l’on désire faire un parallèle avec des formations teutonnes, l’on pourrait dire que le vecteur d’« Exit » est un hybride situé à mi chemin entre Lunar Aurora et Farsot.
Là où « Royaume De Glace » de Sombres Forêts n’avait pas reçu de « coup de cœur » il y a quelques temps, alors évoluant dans le même genre de cour et dégageant autant de personnalité qu’Agrypnie, on peut sentir dans la présente formation une réelle entité, tous les musiciens usant de leur excellente technicité pour créer une essence ultra sensible.
Là où « Monotheist » de Celtic Frost n’était pas devenu un incontournable dans ma discographie à cause de ses irrégularités, « Exit » ne comporte aucune longueur, aucune langueur. Sa matrice est claire, son corps est continu, ses compositions sont constantes, son espace est indéfiniment étendu en profondeur …
Magnifique.