Il y a des groupes (rares, il est vrai) qui arrive sans être purement avant-gardiste dans leur démarche et qui, sans en mettre de partout ou essayer véritablement d’innover, arrive à faire quelque chose d’absolument à part et unique.
SIAMESE FIGHTING FISH (Ne taper pas le nom sur les moteurs de recherche, vous tomberez sur la description de ce charmant petit poisson d’eau douce aux couleurs chatoyantes appelé le Combattant en français, ou Betta Splendens et dont il faut séparer les mâles sous peine de les voir se battre à mort…) est un jeune groupe danois dont le premier album « We are the Sound » sorti en début d’année dans leur pays natal, va bientôt être disponible dans toute l’Europe. Le groupe joue une musique aux frontières du "rock" et du "metal" portée par l’esprit et l’histoire de son chanteur Mirza (on ne rit pas) Radonjica, réfugié au Danemark mais originaire des pays de l’Est (probablement l’ex-Yougoslavie). D’un point de vue de sa constitution, la seule particularité du groupe est la présence d’un violoniste Jonas Klitgaard en lieu et place du traditionnel claviériste.

Dès les premiers morceaux, je dois dire que j’ai été impressionné par ce jeune groupe, tant par l’originalité (je n’ai jamais entendu quelque chose qui ressemble réellement à ce que propose SIAMESE FIGHTING FISH) que par l’énergie développée par les premiers morceaux (« Chronicles of Lovers » et surtout « K.I.T.T. and The Heroic Villians »). Le groupe entretient très savamment la dichotomie relativement classique en elle-même, entre des passages durs typés "metal" et des passages "indie rock" voire presque "pop" très mélodiques, alternant gros riffs et trémolos, chant clair et hurlé. Cependant, on est dans quelque chose de bien fait, pas de totalement classique pondu par un nombre incalculable des groupes de "metalcore" évoluant peu à peu vers un cliché désuet (à peu de choses près: intro, exposition du riff, couplet en scream, refrain voix claire et sirupeuse, couplet hurlé, refrain voix claire, bridge, refrain voix claire, conclusion).
Tout d’abord, les passages à chant hurlés ainsi que les gros riffs de guitare sont puissants, sans être jamais réellement violents, quant aux passages plus typés "indie rock" sont doux et bien chantés, mais sans jamais tomber dans le racolage et le non-original, ni être réellement facile d’approche (même pour les titres qui en seraient le plus proche : la ballade « For You » et « Vilo Moja »).
La deuxième chose tient dans les structures tout sauf traditionnelles, imprévisibles, même si on retrouve parfois le coté refrain-couplet; avec des rythmiques inspirées pas vraiment metal ni réellement rock rappelant parfois SYSTEM OF A DOWN, le violon faisant quelques apparitions remarqués au premier plan (notamment sur « A Liar Cried Wolf » ou l’excellent « Perfect Human Being ») même s’il a plus souvent un rôle d’enrobage atmosphérique au second plan. Le chant est un vrai moteur émotionnel à cette musique avec une vraie intensité dans la voix.

Au final, voici un album rare dont la placide singularité m’a convaincu comme rarement des hybrides rock-metal ne l’ont fait. Puissant, mélodique, émotionnel, corsé, mûr, sensible, étrange… SIAMESE FIGHTING FISH est un nom qu’il faut définitivement retenir pour ce qu’il est : un groupe muni d’une vraie identité, d’un talent sans borne et d’une grande ouverture d’esprit, dont la musique pourra convertir à la fois des amateurs de "rock" et un public plus "metal".