Une soirée caritative, cela n'est pas rare par les temps qui courent, mais un concert de rock metal organisé par une association humanitaire elle-même gérée, entre autres, par de jeunes amateurs de metal, c'est déjà moins fréquent. C'est pourtant ce qui s'est passé vendredi 30 septembre, à la salle Ô Totem (MJC) de Rillieux, au Nord-est de Lyon. Cette soirée a été une réussite, disons-le d'emblée, autant en ce qui concerne le choix des groupes qu'en termes d'affluence, l'une des plus importantes que ce lieu ait connue depuis que des concerts de rock metal y ont lieu. Une entrée pour deux euros (symboliques) et un kilo de produits alimentaires non périssables, c'est une belle initiative qui mérite d'être saluée. Cinq groupes se sont succédé pendant plus de quatre heures, dans une atmosphère chaleureuse, sous le signe de l'amitié et de la solidarité.

Dès 20h, c'est un quintette assez méconnu dans la région, SPACE CALL, groupe de metal industriel, qui va donner le ton de la soirée. Quelle agréable surprise, car méconnu, SPACE CALL ne le restera pas longtemps. Un chanteur très doué, capable de moduler sa voix en fonction des chansons interprétées (en anglais), un habitué de la scène, son charisme en atteste, entouré de ses quatre collègues et amis, va retenir l'attention du public déjà nombreux pendant 40 minutes. Voix rauque, plus aiguë ou plus claire, des mélodies sombres ou des morceaux plus rapides, tous ces éléments font qu'on a affaire à un subtil mélange des genres, en général réussi et apprécié. SPACE CALL s'est forgé une identité propre, qu'il sait mettre en valeur sur scène. On le constate notamment à la fin du set, lorsque le chanteur - avec sa casquette de policier soviétique, tête de mort en plus - fait reprendre en chœur "Super Star", titre de l'album de 2009, ou à l'occasion d'une séquence instrumentale où chaque musicien apporte sa touche personnelle, ce qui fait de SPACE CALL un groupe atypique et original. Ecoutez leur album sorti le 28 septembre, "Synchrotron", et sachez qu'ils ont déjà eu l'occasion de se faire apprécier, depuis 2006, année de leurs débuts avec le line-up actuel, sur les scènes parisiennes et que plusieurs magazines et webzines français et étrangers se sont intéressés à eux. Par ailleurs, leurs goûts musicaux personnels sont assez éclectiques, d'ALICE IN CHAINS à RAMMSTEIN. On entendra parler de SPACE CALL....

Set list de SPACE CALL

-Synchrotron

-Mediatik

-Dies Irae

-RIP

-Hell Yeah

-Spit on Me

-And I'm Gone

-Scream Like a Pig

-Flash Light

-Psychotik

-Superstar

Le groupe suivant est un trio féminin originaire de Vienne et du Nord-Isère. Il s'agit de RAZ' ROCKETTE, trois jeunes femmes, chanteuses et musiciennes de haut niveau, qui viennent de remporter le Tremplin Inter-Ecoles 2011 Rhône-Alpes. Elles chantent en anglais dans un registre que l'on pourrait appeler "pop punk rock", rafraîchissant et "vitaminé", en tout cas agréable à l'oreille. Ces filles, promises à un bel avenir professionnel dans le chant et la musique en général, ont le sens de la rigueur et de l'esthétique. La titulaire de la batterie possède un talent rare, et le trio nous gratifie de rythmiques incisives de toute beauté. Jamais ennuyeuse, car très variée, leur prestation a visiblement plu aux spectateurs qui les ont applaudies des deux mains à l'issue de leur set de 35 minutes. Les filles de RAZ' ROCKETTE jouent et chantent ensemble depuis quatre ans, elles ont à leur actif trois démos et plusieurs participations à de grands concerts ou festivals. Un premier album est prévu pour le printemps 2012. Intelligentes, sympathiques et ambitieuses, elles sauront, n'en doutons pas, se faire connaître sur la scène nationale.

On change complètement de registre, tympans fragiles, s'abstenir ! C'est BOUNTY HUNTER qui va déverser sur le public, toujours aussi déchaîné quand "les BH" montent sur scène, non seulement des tonnes de décibels, mais un stock de rouleaux de papier fabriqué à base de cellulose...Pauvres arbres ! Y a-t-il des écolos dans la salle ? Le décor est planté, le nom du groupe de "brutal death / grind" apparaît en lettres lumineuses de part et d'autre en arrière plan, les visages de nos cinq loustics ( lustig = joyeux , en allemand) sont recouverts de maquillages blancs, noirs etc. Tempête sur scène, tsunami dans la fosse ! Florian et Mike ne lésinent pas sur les moyens, leurs cordes vocales sont mises à rude épreuve, growl, gruik, c'est la guerre à la MJC de Rillieux...Il y en a pour les yeux et pour les oreilles, spectacle brutal, martial, mais pas violent du tout, sauf les instruments qui hurlent de douleur sous la torture. L'apothéose est atteinte quand Laeti rejoint Flo sur scène, se saisit du micro et se livre à une petite démonstration vocale à l'occasion de son anniversaire ...Pogos, slams, cela devient une banalité. Mais redevenons sérieux, car les gars de BOUNTY savent eux aussi l'être quand il le faut. N'oubliez pas leur album sorti il y a déjà quelques mois et qui s'appelle S.Y.L.A.K. Bizarre, non ?

Avec THE OATH, c'est encore un autre concept. Bientôt 23 heures, le temps passe vite, c'est bon signe. Le groupe lyonnais de black-death-thrash dont le frontman Pierre s'adresse régulièrement avec modestie et sensibilité à son public, car THE OATH gagne à chacun de ses concerts de nouveaux adeptes. Le combo a de l'expérience, de l'originalité, notamment avec son claviériste, qui intervient vocalement avec bonheur. Notons aussi la présence de Christian, nouveau bassiste discret, mais efficace. Servi par un chant énergique, hargneux, teinté de growl, THE OATH est aussi capable de nous livrer de belles compositions mélodiques. On retrouve le charme de ces combinaisons et de ces nuances dans les chansons de leur album "Self-Destructed", dont sont issus la plupart des titres de ce soir. Ce groupe ne cède pas à l'autosatisfaction, se remet apparemment sans cesse en question. Nul doute que THE OATH est en train de monter en puissance, plusieurs concerts sont programmés, en attendant le prochain album ?

Set list de THE OATH

-Intro

-Consequences

-End of the Lines

-Watch Me Bleed

-Embraced

-Question of Faith

-Crimsom Flesh

-Impossible Cure

-I Am Nothing

-Outro

Et c'est FRONTAL, un autre groupe lyonnais fondé il y a seulement quelques années, qui donne dans le thrash technique, classification peut-être un peu facile, qui va conclure cette soirée de solidarité. Ils sont cinq sur scène, on les connaît, on les apprécie. Ils ont produit une démo en 2010, et lauréats d'un tremplin, ils ont eu l'honneur et le plaisir de se produire au Wacken Open Air 2010 avant l'ouverture officielle. Le groupe s'identifie à son chanteur charismatique, Diego, dont la voix puissante retentit encore dans les oreilles de ses fans, ou plutôt de ses amis. On se souvient aussi de SWINE PUNCH, combo où il officiait déjà dans un autre genre. C'est un musicien authentique aux multiples talents qui se produit ici, ce soir, pour la dernière fois dans FRONTAL. Peut-être les gens, jeunes et moins jeunes, qui pogotent et s'amusent devant la scène ne le savent-ils pas? L'émotion est palpable lorsque les plus motivés montent sur scène alors que l'on joue "No More Safety". En guise d'hommage, Diego est porté par ses fans un peu tristes. Tout cela n'aura duré que 30 minutes. Qu'ajouter ? Bon vent à FRONTAL, au revoir à son chanteur !

Un accueil sympathique, une organisation irréprochable, des styles musicaux variés et une ambiance à la hauteur de l'événement, dans une belle salle parfaitement adaptée à ce genre de concert, et un son de bonne qualité...Que demander d'autre ? Le public s'attarde dans le hall, au bar ou à l'extérieur... Que soient très sincèrement remerciés les membres de l'association JAMAIS, Florian Beaufils, son jeune président, tous les bénévoles, les musiciens, chanteurs et chanteuses, et tous ceux qui ont fait le déplacement à Rillieux. Désormais, ils savent où se trouve cette fameuse salle. Opération à renouveler.