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Mise en ligne le : 26 janvier 2024  | Intervieweur : IvanJack25 | Traducteur : IvanJack25

INTERVIEW francaise - pavillon 666 - webzine metal rock
Bonjour Vivien, merci de m’accorder cette interview pour Pavillon666. Ton dernier album « The fish who wanted to be king » vient de sortir chez Frontiers et se trouve être à nouveau un grand moment de musique. Peux-tu nous en dire un peu plus sur la composition des titres, les enregistrements ?

Bonjour Ivan, merci beaucoup. Concernant les compositions, j'ai opté pour une approche totalement différente sur cet album. Je m'occupais habituellement de tout ; des riffs de guitare, des lignes de basse, etc. mais cette fois, j'ai commencé par élaborer les idées depuis mes claviers, parfois uniquement avec un piano. Ensuite, je partageais ces ébauches avec mon guitariste/bassiste, Joop Wolters, qui prenait le relais pour composer les parties guitare et basse. Ce qu'il me renvoyait était parfois si bon que cela se retrouvait tel quel sur l'album. Et d'autres fois, j'étais tellement inspiré par une de ses idées que je développais davantage un passage, ou modifiais la structure du morceau. Cette méthode s'est révélée fantastique, car, en tant que perfectionniste quand il s’agit de mes compos, j'ai souvent du mal à apprécier ma propre musique. Or, en travaillant de cette manière j'écoute le résultat avec beaucoup plus de distance, comme si c'était l'œuvre de quelqu'un d'autre. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre. Pour le reste, les enregistrements se sont déroulés en France, en lisière de la forêt de Fontainebleau, chez mon batteur et co-producteur Jelly (Cardarelli) lequel a beaucoup apporté aussi. C'est là que Damian (Wilson) nous a rejoint pour les prises de chant.

Le précédent album « Paint the sky » est pour moi un monument de rock/metal progressif, du grand art ; outre-le line-up principal, il y avait des invités prestigieux comme Steve Walsh, Simon Philips, Tony Franklin, Jordan Rudess. Vikram Shankar, Jens Johanson… Tu n’as pas désiré réitérer l’expérience pour ce nouvel album ?

Non, bien au contraire, mon objectif étant de créer un album plus « brut », plus intimiste, avec une sonorité reflétant davantage l'esprit d'un groupe plutôt que celui d'un projet. Les albums regorgeant d'invités peuvent parfois donner une impression de prétention, et de surproduction, qui est à l'opposé de ce que je cherche à faire. J’ai senti qu'il y avait une alchimie particulière entre nous quatre. J'étais désireux d'explorer cette dynamique en optant pour ce line-up restreint. L'idée était de voir comment nous pourrions créer quelque chose de plus personnel avec moins de monde. Bien sûr, chacun est libre d'apprécier ou non la musique, mais je pense que, cette fois-ci, nous sonnons davantage comme un « groupe » et moins comme un projet.

L’un des avantages de ta musique est d’accueillir l’exceptionnel Damian Wilson (Threshold, Arena, Star One…) au chant. Etes-vous amis depuis longtemps, comment vous êtes-vous rencontrés ?

Mon idée derrière ce « reset » de Lalu était d’effectuer un retour aux sources du rock progressif, mais dans un contexte plus moderne. J’adore Spock’s Beard et The Flower Kings, mais je ne voulais pas faire du neo-prog. Damian étant un ami de longue date depuis le début des années 2000, il m’apparut comme le choix parfait pour cette mission ayant déjà démontré sa capacité à chanter dans un style très proche de Jon Anderson, tout en évoluant dans un univers moderne très « prog metal » avec Threshold, Ayreon etc. Du coup j’ai recontacté Damian en 2019, et cela a fonctionné comme par magie. Il aime écrire ses propres paroles et lignes de chant, ce qui est parfait pour moi puisque je préfère me concentrer sur les compos (haha).

Quels claviers utilises-tu ? Es-tu endorsé par une marque spécifique ?

J’utilise les claviers Roland exclusivement. J’ai effectivement historiquement toujours été un artiste Roland, j’ai même fait une banque de sons officielle pour le JD-XA. Roland Japan a pour habitude de m’envoyer leurs nouvelles machines pour que je les utilise sur mes albums. Mes claviers préférés restent quand même les légendaires D-50, XP-80 (et la version expander /JV), le JD-800, etc.

Quelle est la signification de ce titre énigmatique « Le poisson qui voulait devenir roi » ?

Eh bien, comme tous les vertébrés, on descend des poissons au sens large. L’idée comme quoi on était de simples créatures sous-marines avant de devenir successivement amphibiens, reptiles, mammifères / primates, pour finalement peupler la terre entière et en épuiser les ressources avant de nous envoler vers Mars et les étoiles, est plutôt fascinante. Le fait que le titre est au passé signifie que cette histoire se finit mal pour les humains (haha). Ce qui contraste avec le côté super-positif de l’album précédent. L'humanité a tendance à se considérer comme le centre de l'univers. Alors, cette narration de l'évolution, combinée à cette vision hyper-égocentrique de l'humanité m'a inspiré ce titre « The Fish Who Wanted To Be King ».

Un morceau m’intrigue beaucoup, « Is that a London number » ? Le titre est très étrange et les textes sont très minimalistes, peux-tu nous en dire plus ? N’est-ce pas une sorte de « private joke » ?

Eh bien oui, j'ai une histoire très amusante à raconter à ce sujet. Tout d’abord, c’est un faux « morceau simple », étant quasiment tout du long en 15/8 et donc très progressif et complexe, malgré les apparences. Le but c’était de faire un truc qui sonne comme une fusion de Toto et Yes des années 80, deux de nos plus grandes influences. Mon batteur et co-producteur Jelly était particulièrement fou du refrain, anticipant les vocals de Damian Wilson avec une certaine appréhension... du coup j'avais parlé avec Damian de son idée d'utiliser ce titre pour chanter l'annuaire téléphonique (car certains fans sur YouTube disaient qu'il sonnerait bien même s’il chantait l'annuaire). Jelly n'étant pas au courant, c’est devenu une sorte de jeu pour Damian de le "troller" pendant les enregistrements (haha). Quand il est venu pour enregistrer ses parties de chant, il a surpris Jelly (lequel était aux manettes pendant toute la prod – des enregistrements au mastering) en imitant une sonnerie de téléphone, chantant “Ring! Ring!” de la manière la plus « cartoon » qui soit, énumérant seulement des chiffres (“53”, “40”, “77”, etc.), et lisant à voix haute des adresses d’un vieil annuaire Londonien. Jelly était perplexe, il faisait la gueule mais enregistrait tout de même les couplets – c'était hilarant (haha). À la fin, au lieu de "Is That A London Number", Damian a dit "Is That A London Banana?", créant une énième réaction chez Jelly. C'était délirant de le "troller", vu que le refrain de la chanson était son refrain préféré sur tout l'album, et qu’il s’attendait à du Joseph Williams…

A l’instar d’un Tony Banks dans Genesis, ta façon de jouer est très discrète en même temps qu’elle est omniprésente. Tu joues très peu de chorus de claviers mais lorsque tu en proposes, ils sont terriblement bons, par exemple le solo de moog dans « Deoxyribonucleic Acid ». Est-ce une volonté de ta part ou est-ce pour laisser toute la place à ton non moins brillant acolyte et guitariste Joop Wolters ?

Merci beaucoup pour le compliment, mais je suis un mauvais claviériste surtout comparé à Tony Banks. Je joue rarement des solos de clavier sur mes albums, à moins qu'il s'agisse d'un album de jazz/fusion instrumental (haha). Mais généralement, je trouve cela très risqué. Il y a toujours des gens qui ne sont pas fans des solos de clavier, ou de certains types de sonorités, du coup j'évite d'en faire car cela peut donner une fausse impression de prétention que je cherche absolument à éviter. En général, je laisse faire les autres quand ils sont vraiment forts et que j'ai une idée spécifique sur une partie, par exemple, il y a un magnifique solo de piano de Matt Daniel sur le morceau instrumental, ainsi que son solo de Moog sur l'intro de « ...London Number ». Mais tu as raison, c'est vrai que Joop est incroyable et j'aime laisser autant de place que possible pour ses solos – j’ai toujours préféré que les solos soient principalement des solos de guitare.

Quelles sont tes influences, de jeunesse et actuelles ? Qu’écoutes-tu en ce moment ?

J'ai été exposé à la musique de Yes, Genesis et consorts depuis mon plus jeune âge. En grandissant, j'ai par la suite découvert le heavy-metal (Iron Maiden, Megadeth, Judas Priest etc.) et la rencontre avec la musique de Dream Theater au lycée a été une révélation pour moi. Leur style, mélangeant mes genres favoris avec des claviers et des envolées progressives sur fond de guitares heavy et une batterie à double grosse caisse, m'a profondément marqué. En ce moment j’écoute beaucoup Hania Rani (sa musique est une putain de tornade émotionnelle), ainsi que Dirty Loops (sans doute mon groupe favori depuis quelques années maintenant). J’écoute même du Hip-Hop, ce qui surprendra pas mal de gens j’imagine (haha). Je fonctionne surtout par chanson et non par « style » de musique ; Une bonne chanson est pour moi une bonne chanson, quelque-soit le genre dans lequel elle s’inscrit. Tiens, je t’en donne une que j’écoute en boucle ces derniers temps : « Dancing the Tokage » de Yasunori Mitsuda (tiré du jeu « Chrono Cross »).

Des concerts sont-ils prévus pour promouvoir cet album ?

Pas tout à fait – nous venons de terminer la mini-tournée célébrant l'anniversaire de carrière de Damian Wilson, où nous avons interprété quelques morceaux de "Paint the Sky" ainsi que « …London Number ». Cette expérience a été très enrichissante, mais maintenant, je suis de retour à la phase de composition. C'est une période exigeante et stimulante car j'ai une multitude de projets en tête. Je me trouve face à un défi considérable, surtout parce que j'ai une vision spécifique pour le prochain disque, et je suis encore en train de déterminer si cette idée est techniquement réalisable. Bien que je ne puisse pas divulguer trop de détails à ce stade, je suis convaincu que le résultat sera sympa si je parviens à concrétiser ma vision. Le processus de création est en cours – il promet d'être une aventure passionnante, non seulement pour moi mais aussi, je l'espère, pour les musiciens qui m’accompagnent et pour les auditeurs / auditrices.

J’ai vu que tu composais également des musiques de films. As-tu des exemples à nous donner ? Arrives-tu à vivre de ta musique ?

Je ne vis pas exclusivement de ma musique. Bien que j'aie la chance d'être indépendant, je donne aussi pas mal de cours pour compléter mes revenus. Cependant, mon activité principale reste liée au son et à la musique, donc on peut dire que j'en vis, d'une certaine manière. Bien sûr, il y a certains désavantages, comme l’absence de comité d'entreprise, dont je ne bénéficie plus en menant cette vie d'artiste indépendant (haha). J'ai composé de la musique pour des films, des émissions télévisées, des jeux vidéo, etc. Parmi mes travaux, il y a quelques chansons officielles pour les magasins Carrefour, toujours utilisées par le groupe en 2024, ma participation à la bande originale du film « Seuls Two » de Eric & Ramzy pour Warner Bros. France, de nombreux génériques d'émissions pour les frères Bogdanoff (paix à leur âme), ainsi que des B.O. pour des documentaires diffusés sur France 2, Arte, puis de la musique et des effets spéciaux pour des jeux enfantins de Neko Entertainment (Cocoto Alien Brick Breaker, Faceez) et Ubi Soft (la série Alexandra Ledermann – par exemple les sons de cheval qui mange des pommes de terre, c’est moi, haha) sur Nintendo DS, 3DS et WiiU. Ce sont des travaux que j'évite généralement de mentionner dans les interviews « prog », mais voilà, maintenant c'est dit. R.I.P.

Merci pour ton temps et encore un grand bravo pour ce sublime nouvel album. Le mot de la fin est pour toi, si tu le désires.

Merci beaucoup pour ces compliments, et pour avoir pris le temps d’écouter, et de parler de cette musique. Elle ne paie pas le loyer mais vient pour ma part de très loin, étant dans le ventre de ma maman lorsqu’elle était aux claviers sur scène, faisant partie du groupe de prog à mon papa (guitare/chant) dans les seventies. J’ai été exposé à leur musique et celle de Yes, Genesis, Kansas etc. depuis avant même ma naissance. C’est donc fondamental pour moi – un truc qui vient du fond des tripes – et savoir que des gens écoutent et apprécient cette musique motive à travailler dur et continuer d’avancer quelles que soient les difficultés. Merci !

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