Le crossover du rap avec le métal, le hardcore ou tout autre tendance sonique (plus ou moins énervée si on pense à l'électro, l'indus...) n'est pas nouveau. Les résultats de ces mélanges (plus ou moins solubles) sont incarnés par une kirielle de formations ( on peut citer : Bodycount, Stuck Mojo, RATM, Dälek, Prodigy ou Death grips...) dont les productions, de la fin des années 80 à maintenant sont autant d'exemples (plus ou moins convaincants).

As a new Revolt, en activité depuis 2013 avec son actif unEP « Speechless » gagne haut la main le pari de la mixité stylistique en évitant donc le côté casse gueule d'une entreprise musicale potentiellement risquée avec « TxRx », son premier LP. Rassemblant neuf titres (quatre issus du EP « Speechless » auxquels s'ajoutent cinq nouvelles compos), le duo grenoblois(un batteur, Julien Lhuillier et un chanteur, Manu Barrero officiant également aux machines), compose une musique brute, énergique (voir écorchée) jamais désespérée mais tendue, sombre, toujours sur le fil. Concernant l'aspect vocal, c'est un timbre de voix et un flow nerveux qui fait immédiatement à Zack de la Rocha mais plus qu'à RATM c'est, pour les spécialistes, à One Day as a lion qu'on pensera, projet inachevé mené en duo avec John Theodore (ex The Mars Volta et actuel batteur de Queens of the stone age) ayant simplement donné naissance à un EP et quelques concerts il y a de cela dix ans. La musicalité, quant à elle, tisse ses notes autour de gimmicks synthé entêtants (« Blood brothers », « Speechless », « Riot-porn ») comme autant de ritournelles torturées et hypnotiques aussi saturées que des guitares, le tout renforcé par des basses massives et des samples inquiétants, voir malsains, qui ne sont pas sans rappeler Prodigy. Le tout s'agrégeant autour de rythmiques groovy, assommantes, inventives et donnant naissance à de véritables bombes sonores.

Mis à part quelques titres aux relents plus dub/électro (« Now », « Perfect »), le ton s'avère donc résolument hardcore, aux contours bien tranchants. Le tour de force du duo est de proposer un album où l'équilibre semble reposer à la fois sur l'urgence du propos à cracher à la face de l'auditeur et sur un patient travail de composition où chaque rythmique, chaque plan, chaque flow, chaque break a été savamment pensé. « Rétina », servi au passage par une vidéo des plus réussies, est peut-être l'exemple qui illustre le mieux cette tension, qui difficilement contenue, conduit à un refrain incarné par une explosion rageuse inévitable mais nécessaire, salvatrice.

« TxRx » est un album résolument moderne et novateur, puisant pourtant ses racines en partie dans une inspiration old school, pour accoucher au final de morceaux puissants évitant la redondance par une créativité étonnante qui a la capacité, à mon sens de fédérer des publics issus d'horizons des plus divers.