Cela va bientôt faire douze ans que le Colorado est habité par une sombre entité, se manifestant presque chaque année lors du même rituel musical. La première cérémonie emblématique, durant laquelle la bête s'était presque extirpée de l'underground se déroula en 2008, avec la sortie du premier râle de NIGHTBRINGER, sobrement nommé "Death And The Black Work". Depuis, le rituel est annuel. Invitant parfois d'autres maîtres de cérémonie, comme en 2009 avec le split "On the Powers of the Sphinx". Nox Corvus et Naas Alcameth maintiennent en vie la créature issue des entrailles du Malin, lui insufflant leur souffle, le temps qu'elle répande sa noirceur en Son hommage. Cette année, sous la bannière de "Season of Mist", "Hierophany of the Open Grave" perpétue la flamme en tant que troisième Full-Lenght officiel des Américains.

Officiant dans un style bien à eux, les membres de NIGHTBRINGER mélangent avec habileté et savoir-faire les ambiances ésotériques à un "Black Metal" loin d'être minimaliste. Le message véhiculé ici, étant savamment orchestré de manière à offrir à l'auditeur, certes, un déluge de noirceur, mais également un voyage porté par de multiples mélodies sous-jacentes et se fondant sans peine au résultat final, pour donner une œuvre hétérogène, intéressante et sortant du lot. Débutant avec un "Rite of the Slaying Tongue" imposant, d'entrée de jeu, une atmosphère macabre et assez mystique, le groupe ne perd pas de temps pour démontrer son savoir-faire à son auditoire. Dévoilant un jeu rythmique varié et polyvalent aux sonorités dissonantes, appuyé par la voix torturée de Naas Alcameth, sublimant l'ensemble telle une touche de noirceur finale, rendant le tout désormais apte à passer aux choses sérieuses. Si les deux pistes suivantes renforcent bien l'impression laissée par ce premier aperçu, tout en développant tout de même plus l'aspect mélodique, il faudra attendre l'arrivée du très bon "Lucifer Trismegistus", afin de prendre une petite bouffée d'air frais au travers de cette composition mettant en exergue une facette plus brutale de la musique de NIGHTBRINGER. Apportant alors un second regard sur l’œuvre de la part de l'auditeur, jusqu'alors subjugué par la lancinance du riffing, ne s'envolant que lors de breaks bien placés. L'aspect mélodique, qui semble si important au quintette américain étant toujours bien présent, mais apporté d'une manière différente.

"Hierophany of the Open Grave" est typiquement le genre d'album qui ne laissera poindre aucun ennui chez vous, pourvu que vous appréciiez ce registre de "Black Metal" aux relents orthodoxes. Très varié dans sa forme, aucune piste ne se ressemble et les morceaux sont à tiroir. Toujours imprévisibles (mais pourtant, tout à fait limpides) dans leur évolution, des compositions telles que "The Gnosis of Inhumation" pour son final intense, ou encore le très dévoué "The Angel of Smokeless Fire", risquent de ne laisser aucun amateur du genre indifférent. On regrettera tout de même une fin d'album manquant d'intensité à cause d'un "Via Tortuosa" très mou et peu intéressant, amenant un "Old Night" assez bateau, correct, mais qui souffre de ce manque de moment fort qui en aurait fait un final adéquat.

La bête NIGHTBRINGER signe ici un troisième album des plus honnête, qui saura trouver sa place dans les discographies des amateurs de "Black Metal" sincère dans sa démarche et dévoué dans ses croyances. "Season of Mist" peut être fier de son dernier protégé qui leur offre là, un bon aperçu de son talent. Si l'on en croit le rythme de parution du groupe, la suite arrivera sans trop tarder et on peut d'ores et déjà gager qu'elle sera délectable.